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par Darchari MIKIDACHE, président du Cercle des Économistes et des Experts Comoriens (CEEC)

Les Comores viennent de fêter leur 39ème anniversaire d'indépendance acquise le 6 juillet 1975. Nombreux citoyens s'interrogent quant aux acquis depuis la déclaration unilatérale d'indépendance. Face à la crise économique qui sévit partout dans le monde notamment aux Comores avec les problèmes de chômage des jeunes et les délestages qui affectent le quotidien des citoyens et des opérateurs économiques, il convient de poser les jalons de pistes possibles pour un développement durable des Comores. Dans ces conditions, quelles seraient les politiques à mettre en œuvre pour que l'indépendance soit signe de progrès réel au service de la cohésion nationale?

Un enseignement professionnalisé, technique et adapté aux défis du développement des Comores devrait essentiel

L'éducation nationale et la santé constituent le fondement indispensable pour favoriser un développement profond et durable. Non seulement un programme spécial d'amélioration du niveau général des élèves et des étudiants doit être mis en œuvre mais il faudrait  aussi orienter l'enseignement vers la formation technique et professionnelle tout en développant l'apprentissage  des métiers et les cursus en alternance. L'Université des Comores ne doit pas seulement faire travailler des docteurs et doctorants. Elle devrait également faire bénéficier davantage à ses étudiants des cours de véritables professionnels disposant d'une expertise et une expérience avérées dans des secteurs considérés comme stratégiques comme l'agriculture, secteurs halieutique et de la maîtrise agro-alimentaire, entrepreneuriat, Banque et micro-crédit, tourisme, Marketing,fiscalité et comptabilité, management et conception de projets, coopération décentralisée, transformation industriel, conservation et conditionnement des produits, exploration de marchés et exportation, études du secteur pétrolier, Nouvelles technologies et web avec la délivrance de certificat professionnel etc. Pourquoi ne pas signer un accord de coopération et de formation avec l'Institut de l'entrepreneuriat de la Francophonie basé à l'île Maurice ou d'autres accords avec des Universités techniques et professionnalisées du Sud à l'exemple de celles d'Inde ou du Brésil ayant les mêmes problématiques de développement? Le télé-enseignement et la recherche agronomique constituent des disciplines à développer. Ce ne sont pas les compétences qui manquent tant au niveau local qu'au sein de la diaspora comorienne.

Des manuels de référence non seulement en histoire devraient être élaborés pour transmettre à nos jeunes des outils de raisonnements adaptés aux défis de développement de notre pays. Il est essentiel de renforcer la Recherche nationale et mobiliser toutes compétences y compris celles de la diaspora.

Une priorité devrait être accordée à nos hôpitaux en disposant au sein de chaque île, d'un hôpital de référence aux normes internationales. Des fonds spéciaux devraient être dégagés à cet effet. Un citoyen en bonne santé est plus productif.

Une révolution verte, le développement du tourisme et des infrastructures sont des pistes créatrices d'emplois durables

Par ailleurs, nous devrons aller vers une politique de promotion de l'agriculture, la valorisation et transformation de nos produits locaux et une nouvelle stratégie de préservation de la sécurité alimentaire. Cela doit être une priorité absolue. Cela peut créer des emplois pour les jeunes et les moins jeunes. La réduction de la pauvreté passe par une révolution verte. De même, une relance du tourisme avec un plan pluriannuel est indispensable en valorisant nos atouts. Cela devrait commencer par une réduction des coûts de transport en préservant et en valorisant notre patrimoine naturel, culturel, historique et intellectuel. Bien entendu, il faudrait développer davantage nos infrastructures et lutter contre le sentiment d'impunité en sanctionnant de façon dissuasive. Un nouveau slogan serait par exemple"A tout crime, sanction immédiate et dissuasive". La lutte contre la corruption devra se poursuivre avec une justice rapide et incorruptible.


 

Réduire le train de vie de l’État est un préalable primordial pour doter le pays de bases économiques solides

Beaucoup de mesures sont possibles à commencer par une réforme de l'État qui devrait réduire son train de vie, en rendant plus efficace son administration ou en supprimant les fonctions doublons au sein des îles et de l'Union. Pourquoi ne pas envisager au cours du prochain mandat présidentiel de toiletter nos institutions de mettre à la tête de chaque Vice-présidence et de chaque Gouvernorat réunis, une seule personne avec un seul cabinet? Ce qui réduirait ou supprimerait les postes doubles, et ferait des économies substantielles en matière de budget de fonctionnement public. En élisant une seule équipe pour diriger le pays, le pays gagnerait en évitant les empiétements de compétences avec un fonctionnement efficace, cohérent et pacifié des institutions étatiques plus proches des préoccupations des citoyens. La fusion des fonctions de vice-président et de gouverneur avec un seul élu soulèverait certes des résistances et nécessiterait une réforme constitutionnelle. Cela devrait se faire dans le cadre d'une concertation générale et d'un débat national et constitutionnel en impliquant tous les acteurs publics, politiques, parlementaires et les intéressés.

Enfin, il est essentiel de séparer les fonctions politiques des fonctions techniques pour un meilleur fonctionnement de nos administrations et de nos institutions. Il convient également de trouver une solution durable à la problématique de la notabilité non élue et qui s'immisce dans la sphère politique sans disposer d'une légitimité réelle. Il est primordial que chaque corps de la Nation reste à sa place. Les intellectuels devraient jouer pleinement leur rôle et la presse devrait pouvoir disposer de moyens pour fournir aux citoyens des informations diversifiées avec des articles de réflexion et d'investigation.


 

Une solution rapide et concertée en matière d’énergie est nécessaire


J'appelle de mes vœux l'organisation d'assises nationales pour réfléchir et proposer une solution durable aux problèmes de l'énergie et pour mettre fin aux délestages qui nuisent à l'économie nationale. Ces derniers handicapent également la programmation de futurs projets structurants. Aussi, j'appelle au regroupement des fonds et des projets portant sur les énergies diverses et alternatives pour assurer une cohérence globale dans la résolution de cet épineux problème de façon rapide et durable.


 

Mobiliser l'épargne nationale au service du financement du développement économique constitue une piste crédible

Il faudrait également sortir de la culture de l'aide imposée ou liée. Contrairement à d'autres personnalités, je pense que le pays dispose de ressources internes permettant d'engager des investissements structurants stimulant les initiatives privées et l'entrepreneuriat de manière générale. Rien que l'épargne nationale, cette dernière atteint 31 milliards de francs comoriens en 2013 selon les derniers chiffres de la Banque centrale des Comores. Pourquoi ne pas alors créer un livret d'épargne développement (LED) sécurisé à taux attractif, défiscalisé et garanti, et qui permettrait de refinancer des projets structurants de développement national comme les infrastructures à l'exemple de la Caisse des dépôts et consignation (CDC) qui finance le logement social en France à partir du Livret A? De plus, le potentiel fiscal de notre pays sans chercher alourdir les impôts existants ni à surtaxer les entreprises sur la base du nouveau code des impôts en vigueur peut être transformé en ressources fiscales considérables avec la mise en œuvre de politiques fiscales et douanières adéquates. L'application d'un programme national d'intégration d'une grande partie des activités du secteur informel dans l'économie légale constitue une piste sérieuse à étudier.

Une coopération Sud Sud dans le cadre d'un développement endogène ne doit pas être négligée

Bref, nous devons être nos propres acteurs du développement national avec une diplomatie offensive au niveau économique. La coopération Sud-Sud devrait avoir une place privilégiée dans cette nouvelle stratégie diplomatique afin de permettre à notre pays de disposer d'outils efficaces pour enclencher un processus de développement pérenne et créateur d'emplois durables. Le renforcement du secteur privé avec une politique économique à la fois stimulante, novatrice et structurante constitue également une piste indispensable pour contribuer à réduire le chômage et la pauvreté. Il ne faudrait pas non plus oublier de relancer la production nationale agricole par un plan ambitieux et adapté aux potentialités naturelles en mobilisant les agriculteurs et l'ensemble des acteurs publics et privés. Il n'y a que le premier pas qui coûte dans la réforme de notre pays pour permettre un développement durable digne de ce nom.


 

Darchari MIKIDACHE
Président du Cercle des Économistes et des Experts Comoriens (CEEC)

E-mail : darchari.mikidache@gmail.com


http://ceec-comores.over-blog.com


 

Darchari MIKIDACHE, économiste fiscaliste, président du CEEC

Darchari MIKIDACHE, économiste fiscaliste, président du CEEC

Tag(s) : #Développement
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