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Par Darchari MIKIDACHE, président du Cercle des Économistes et des Experts Comoriens (CEEC)

 

Les affaires de détournement de fonds publics et de corruption dont la dernière en date, impliquant une personnalité notable du Muftorat choquent les citoyens et font couler beaucoup d’encre dans les journaux nationaux. Pourtant, la lutte contre la corruption constitue un des chevaux de bataille du président IKILILOU DHOININE pour sa mandature. Cela apparaît d’autant plus grave que le Chef de l’Etat vient de mettre en place, il y’a de cela quelques mois une autorité indépendante de prévention et de lutte contre la corruption sous le nom de Commission Nationale de prévention et de Lutte contre la Corruption (CNPLC). Dans ces conditions, quelles mesures complémentaires pourrait - on mettre en œuvre pour renforcer la lutte contre la corruption ?

 

La corruption, un fléau à la fois destructeur de la cohésion nationale et néfaste au développement

La corruption aussi bien active que passive constitue avant un repoussoir pour les investisseurs étrangers et pour les opérateurs économiques . Elle génère un manque à gagner pour l’Etat non négligeable en termes de recettes tant dans l’attribution des marchés publics que dans les droits perçus dans les administrations publiques sans oublier les pertes induites au niveau de la nation et les effets dévastateurs au niveau du ressenti des citoyens. Le classement du pays au niveau international parmi les pays les plus corrompus contribue à rendre à renforcer la méfiance des institutions financières internationales quant à l’application d’un programme de reformes économiques tel un seau troué qu’on remplit d’eau. La corruption détruit la confiance des citoyens vis -à-vis de la justice et de l’Etat. Elle n’insuffle ni de la motivation ni le sens de valeurs. sentiment d’impunité. Elle ne favorise la cohésion sociale ni l égalité des chances au sein de la population. Si les récentes affaires de corruption ainsi que les détournements de bien de l’Etat restent impunis, cela aura un effet destructeur sur la politique anti-corruption mise en œuvre par les autorités publiques.

Des avancées législatives et institutionnelles notables au service de la lutte contre la corruption

Un premier pas est franchi avec la promulgation de la loi de prévention et de lutte contre la corruption avec l’instauration effective de la Commission Nationale de Prévention de Lutte contre la Corruption (CNPLC) par le président Dr Ikililou DHOININE et dont j’ai préconisé la création dans mon premier article économique intitulé «COMORES : QUELLES RESSOURCES POTENTIELLES ? » publié en mai 1999 dans lequel j’ai proposé la création d’une autorité indépendante de prévention et de lutte contre la corruption . Les mission assignées à cette commission parmi lesquelles figure la définition d’une politique nationale de prévention et de lutte contre la corruption vont dans le bon sens ainsi que le contrôle inopiné de toutes administrations publiques et les sociétés d’Etat sans omettre le contrôle a posteriori des procédures d’appels d’offres et attribution de marchés qui sont définies par la nouvelle loi sur le code des marchés publics. La création d’un numéro vert pour signaler tout acte de corruption à la Commission nationale ne peut qu’être saluée.

La création d’une Cour Suprême avec différentes sections constitue une avancée non négligeable pour la justice de notre pays en permettant aux justiciables d’accéder à une juridiction de dernier recours. Néanmoins, la recrudescence d’actes de pédophilie ou de viols sur enfants mineurs montre des mesures plus coercitives à la fois sur les plans législatif et sociétal doivent être envisagés pour endiguer un tel fléau.

Le sentiment d’impunité ne doit plus désormais se répandre au sein de la population. Tout acte de corruption active ou passive doit être sanctionné conformément à la loi de prévention et de lutte contre la corruption.

Autres mesures pour endiguer la corruption

Des mesures complémentaires s’avèrent nécessaires pour renforcer la lutte contre la corruption à commencer par la création d’une Cour des Comptes ou la transformation de la Commission de Vérification des Comptes (CVC) en Cour des Comptes indépendante comprenant notamment une Cour de Discipline Budgétaire pour les comptables publics et parapublics. En plus de la déclaration classique du patrimoine des autorités nationales déjà mise en œuvre, celle-ci devrait être étendue aux comptables de l’ETAT. Leur responsabilité personnelle et pécuniaire devrait être engagée en particulier pour les receveurs des impôts et des douanes.

La fiscalité au service de la lutte contre la corruption

La prochaine mise en application du nouveau code des impôts voté par l’assemblée impliquera l’instauration d’un impôt sur les personnes physiques. Ce devrait être l’occasion de créer une brigade spécialisée de contrôle de revenus des contribuables dont les trains de vie sont disproportionnés par rapport à l’ensemble de leurs revenus annuels. Ce qui aurait pour effet de permettre de taxer les revenus d’origine indéterminés ou acquis de manière illégale et non déclarée ou éventuellement les signes extérieurs de richesse non appuyés de justificatifs suffisants. Ce qui accroîtra de façon significative les recettes de l’Etat et pourrait contribuer dissuader les contribuables à exercer des activités illicites ou dans le secteur informel.

Bien entendu, la mise en œuvre de la politique de prévention et de lutte contre la corruption ne se limite pas à des mesures de répression à la fois pénales et fiscales. Pour être efficace et durable, elle devrait être accompagnée de campagnes de sensibilisation au niveau de la population sur le terrain et dans les médias. Des modules de formation des agents de l’Etat sans oublier le maintien de façon durable du paiement régulier des traitements des fonctionnaires. De même, des Modules de sensibilisation à la lutte contre la corruption pourraient être inclus dans le programme d’enseignement scolaire et universitaire afin de préparer les jeunes générations prendre conscience de la législation anti-corruptive et de la nécessité de respecter la déontologie au sein des administrations publiques et des sociétés d’Etat.

Darchari MIKIDACHE

Président du Cercle des Economistes et des Experts Comoriens de tous horizons (CEEC).

Contact : ceec.comores@gmail.com

Tag(s) : #Réflexion
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